Le calendrier brassicole a observé pendant des siècles
le calendrier basé sur les contraintes et les bienfaits de la nature.
Avant l’apparition du froid industriel, à la fin du XIXeme siècle, la fabrication de la
bière suivait le rythme de la nature.
Le printemps et l’été, c’est la période des semailles puis des moissons. Cette moitié de l’année
s’appelle le cycle de l’orge.
L’automne et l’hiver correspondent au cycle de la bière. Traditionnellement, la fabrication de
la bière commençait début octobre.
Notes d’automne pour ouvrir le cycle brassicole
La saison de l’automne marque traditionnellement le début du cycle de brassage.
Quand on faisait de la bière en suivant le rythme des saisons, avec les récoltes de
céréales en juillet, des houblons à la fin de l’été, la dormance en septembre, le brassage
commençait début octobre. C’est ainsi que les registres de brassage dans les brasseries
commençaient tous, et commencent encore au début du mois d’octobre.
Fille de l’automne née en octobre, les senteurs de feuilles mortes, de terre et de sous-bois
me destinent naturellement à œuvrer dans la fermentation. J’aime cette lumière des jours
qui diminue, cette période de récoltes, quand la nature donne envie de se mettre au ralenti.
Plus les jours passent et plus la terre est humide. C’est la saison où Déméter part retrouver
sa fille Perséphone aux enfers. Mon mythe préféré car il parle autant de l’amour d’une mère
pour sa fille que de la nature qui se cache sous terre pour mieux renaître.
J’aime l’odeur de l’humus, que je retrouve dans toutes les bières sauvages, et particulièrement
les Lambics et les Gueuzes.
Cette odeur parle de la terre qui se renouvelle, de la vie, de la fermentation, de notre origine humaine.
Ce n’est pas un hasard si les bières de fermentation spontanée opèrent leur magie à partir de la saison
de l’automne. Au dernier étage des brasseries flamandes au moment du refroidissement du moût,
dans le sacro-saint lieu nommé la chapelle, les levures et bactéries présentes dans l’air environnant
ensemencent le moût. Elles sont plus recherchées quand les températures chutent. Le froid sélectionne
les souches les plus résistantes. Ces levures indigènes qui transmettent leurs flaveurs uniques pour la
longue période de maturation dans les barriques.
Traditionnellement, les brassins et les tonneaux étaient numérotés à partir d’octobre : les clients savaient
qu’en achetant des tonneaux portant à la craie le numéro le plus bas étaient sûrs d’avoir de la bière d’octobre.
Elles avaient un goût que l’on ne retrouvait pas dans les autres bières, vineux et de poiré.
Si une partie de cette bière d’octobre était vendue dès sa fabrication (préfigurant ainsi le phénomène
des vins primeurs), elle était surtout mise en garde pour bénéficier des températures froides.
Elle arrivait à maturité fin décembre, au moment de Noël. L’évolution a fait d’elle la « bière de Noël »,
une coutume sans lien direct avec cette tradition.
Le 23 décembre, une autre bière était brassée, qui allait mûrir lentement dans le froid hivernal des
caves de garde.
Pour sortir 80 jours plus tard environ, elle deviendra, elle, la Bière de Mars!